Ethnorégionalisme

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Bannière panceltique

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Le culte du drapeau promis à connaître son apothéose cette année s’inscrit en Bretagne depuis les origines dans le contexte général du culte de l’ethnie (ou, pour Morvan Marchal, l’inventeur de ce drapeau, de la race) bretonne, bien distincte (puisque celte) de la France métisse. Le culte du drapeau plonge dans le culte de l’ethnie qui plonge dans le culte des origines – des origines bien obscures puisque, d’après d’éminents archéologues anglais, les Celtes n’existent pas.  À quoi les Celtes servent-il donc ? À planter le décor d’une Europe des ethnies minorisées appelées à se libérer. 

L’exposition Celtique ? orchestrait récemment tous les lieux communs de la celtitude en passant sous silence l’usage politique qui en était fait. Cet usage commercial à visée politique est parfaitement illustré par les projets du conseil régional tel qu’ils ont été exposés lors de la cérémonie des vœux à la Maison de la Bretagne à Paris. Le président du conseil régional a, en effet, annoncé « trois moments forts pour 2023 : le Forum celte à Lorient qui sera une rencontre des politiques des nations celtes » (dont la Bretagne) ; « le congrès des régions à Saint-Malo » et « la réunion des cinquante ans des régions périphériques et maritimes d’Europe (plus de 200 régions) ». C’est ce que rapporte le journal Bretagne-Ile-de-France.

Pour ceux qui ne le sauraient pas, la Conférence des régions maritimes a été fondée en 1973 par l’autonomiste Joseph Martray (avec la complicité de René Pléven, à la tête du CELIB, le redoutable lobby ethnoaffairiste que Martray avait commencé par mettre en place). Le but de la Conférence des régions maritimes étaitde court-circuiter l’État central et de mettre la Bretagne en relation (sur fonds de ce même État) avec les  autres « nations celtes », Irlande, Écosse, pays de Galles… De fait, comme l’annonçait triomphalement Ouest-France voilà dix ans, célébrant par la voix de Le Drian cette arme efficace de l’ethnorégionalisme, « en quarante ans, la Conférence a largement étendu son champ d’intervention, devenant l’interlocutrice incontournable des institutions européennes, Commission ou Parlement. » Le journaliste, tout acquis à la cause, titrait son article « Les régions maritimes ont pris le large ». Tel était bien le but. Il n’a pas changé. 

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Le Forum celte de Lorient qui devait rassembler ce jour les « politiciens des nations celtes » mais a été reporté pour cause de problèmes de transport (la grève a du bon) s’inscrit donc dans ce contexte global. Un indépendantiste breton maudissait tout récemment le politologue Benjamin Morel, auteur de La France en miettes, coupable, selon lui, d’avoir inventé un « ethnorégionalisme » qui n’aurait aucun sens. L’ethnorégionalisme, c’est ça.

Le panceltisme, le pangermanisme et le panslavisme sont les faces du même. On voit en Ukraine à quoi mène le culte des racines. Les discours lénifiants du président du conseil régional ne font que rendre plus odieuse cette fabrique identitaire que dénonçait déjà Le Monde comme si. 

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2 réponses à Ethnorégionalisme

  1. Nathan dit :

    Bonjour,

    Le travail d’information que vous faites sur le mouvement breton est indispensable même si, malheureusement, il vous vaut haine et invectives de la part de ce mouvement.
    Merci pour ce travail. Beaucoup de choses sont encore à dire pour faire prendre conscience de l’opportunisme et la duplicité de ce mouvement qui aime se présenter sous des allures sympathiques : ouvert, progressiste, »de gauche » . A ce sujet, je me suis souvenu et j’ai retrouvé sur Internet une affiche « Skrivagnerien Breizh », des années 1990 que l’on pouvait trouver un peu partout, dans les associations culturelles bretonnes de l’Emsav mais parfois aussi dans les bibliothèques publiques :
    https://musee-breton.finistere.fr/fr/notice/2014-3-23-ecrivains-de-bretagne-skrivagnerien-breizh-diffusion-avis-de-tempete-vers-1990-musee-departemental-breton-754e8591-1389-46ac-9b19-c5c3b6d2394b
    A l’époque, elle m’avait particulièrement marquée et je l’avais trouvée effarante car, sans aucune gêne, elle « affichait » et présentait le nazi Olier Mordrel comme grand nom de la littérature en breton. Cela m’était apparu déplacé et grotesque : Mordrel ne me semblait pas être particulièrement un grand écrivain, encore moins en breton mais simplement un grand nazi breton. Mordrel était Mordrel, Ok, c’est du passé mais comment peut-on, en toute connaissance de cause, l’afficher ainsi. Les concepteurs de cette affiche ne pouvaient ignorer qui était Mordrel et ce qu’il représentait. Cette affiche était d’ailleurs imprimé par l’imprimeur Cloître, un des imprimeurs du mouvement breton. De plus, outre Mordrel, on trouve sur l’affiche d’autres « grands noms » : Drezen, Hemon, Langleiz …
    Beaucoup de travail (et de plus en plus!) à faire … et il est grand temps :
    – lorsqu’on voit le celtomane STIVELL, promu président d’honneur de la Culture en Bretagne (le très officiel Conseil Culturel de Bretagne) et qui veut sa Bretagne Celtique.
    – l’importance donnée dans la presse régionale à des gens comme Yvon OLLIVIER.
    – les pratiques des employeurs associatifs de l’EMSAV (exemple STUMDI) piétinant le droit du travail « français », maltraitant les salariés mais, auxquels la région BRETAGNE (pourtant, théoriquement « à gauche ») accorde néanmoins des centaines de milliers d’euros de subventions.
    – etc …

    • Françoise Morvan dit :

      Oui, je me souviens de cette affiche qui trônait sur les murs de l’Institut culturel de Bretagne. J’avais protesté contre cette promotion officielle des pires collaborateurs des nazis (toujours sous la figure tutélaire de La Villemarqué) mais cette protestation n’avait servi à rien. C’était la grande époque de l’Institut culturel de Bretagne, diffusant sur fonds publics la propagande séparatiste héritée de Breiz Atao. Mes protestations appuyées sur des traductions de textes de Drezen, Hemon, Langlais, Herrieu et autres grands hommes ont fini par être entendues du président du conseil régional de l’époque, Josselin de Rohan, qui a expédié l’ICB à Vannes et l’a réduit à la portion congrue (ce qui ne l’empêche pas de continuer à déverser sa propagande) mais l’accession au pouvoir de Le Drian a, sous couvert de socialisme, ouvert la voie aux nationalistes dont le triomphe, appuyé par le lobby affairiste breton, n’a plus de limites. Les quelques protestations sont rendues inaudibles, le poids de la censure allant sans cesse s’alourdissant. Et l’argent public coule à flots pour alimenter la fabrique identitaire…

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