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Nous avons appris que l’Académie Charles Cros avait décerné à l’enregistrement d’Eugène Onéguine aux éditions Thélème l’un de ses « 16 coups de cœur 2017 ».
La cérémonie avait lieu dimanche dernier à Château-Thierry. Nous n’avions pas été prévenus à temps, mais l’essentiel est bien que le disque ait retenu l’attention d’un jury que rien ne préparait à être captivé par un enregistrement aussi atypique, et, qui plus est, intégralement bilingue, d’un poème de plus de 6 000 vers…
C’est un enregistrement qui fait suite à une première expérience, d’enregistrement en direct, à Nîmes, pour France Culture, avec Éric Elmosnino et Denis Podalydès. J’avais été engagée par Laure Adler pour jouer le rôle de Tatiana. C’était une expérience tout à fait extraordinaire, en raison d’abord de la présence de Daredjane qui a appris le poème de Pouchkine par cœur, pendant le blocus de Léningrad, alors qu’elle était enfant, et mourait de faim (il y a des descriptions de festins tout à fait merveilleuses dans le texte). Il fallait vraiment avoir cette présence assurée de la transmission d’un chef d’œuvre de (fausse) simplicité accessible à tous pour oser se risquer à participer à l’expérience, mais tout s’était passé presque miraculeusement, malgré les cigales dans les platanes, et autres problèmes adventices.
Cette fois, plus de cigales, et il ne s’agit plus d’une adaptation mais d’un enregistrement du texte intégral. Ce qui le rend si captivant est la manière dont la traduction française répond au russe, et le dialogue est tendu par cette présence d’une traduction invisible, traversée par des zones de transparence pouchkiniennes.
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Nous sommes invités le 1er octobre à 14 h à évoquer cette expérience au festival VO-VF, festival consacré à la traduction.