Après les petits radis, la freizh… Eh oui, dommage, mais il faut bien prendre les choses comme elles se présentent.
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Mes commentaires sur la fraise de Plougastel changée en freizh par le lobby ultralibéral de Produit en Bretagne ont connu un succès spectaculaire : des milliers de lecteurs. Et tout ça pour quelques lignes sur un sujet à peu près totalement passé sous silence (si j’excepte, bien sûr, la propagande omniprésente pour Produit en Bretagne) et sur un site personnel surtout voué à la poésie et, qui plus est, sous des formes non académiques (la freizh, c’est un combat, c’est de la poésie brute, et à quoi bon écrire si ce n’est pour combattre l’écrasement de l’esprit sous la propagande ?).
Mon articulet n’a pas manqué de mettre les militants bretons en fureur car, qu’ils soient de gauche ou de droite, la freizh leur est chère, ils l’aiment, elle correspond à leur goût et ils se reconnaissent absolument dans la freizh industrielle qui défile sous hermine. Le seul défaut de l’affiche, à leurs yeux, c’est qu’elle manque un peu de drapeau (mais, je vais me faire l’avocat du diable, à mon avis, trois hermines valent un gwenn-ha-du).
Quelle belle démonstration !
Et quelle merveilleuse illustration du déni de réalité sur lequel vivent ces militants ! Ce qui les a mis en fureur, ce n’est pas du tout l’évocation de l’affiche, la labellisation ridicule du moindre produit sur base néobretonne, l’asservissement d’une région à un lobby ultralibéral — pour eux, pas de problème, c’est bon c’est breton, on englobe tout dans le pack et vogue la Breizh : j’ai eu tort de ne pas l’apprécier mais ça ne tire pas vraiment à conséquence. Ce qui a provoqué la fureur, c’est (comme de coutume mais je n’en finis pas de m’en étonner) une phrase, une seule, une unique phrase, tout à la fin, rappelant l’origine de Breizh, dans l’orthographe fixée en 1941.
La leçon est claire et nette : il ne faut surtout pas écrire que l’orthographe bretonne a été surunifiée en 1941. C’est un fait historique, d’ailleurs fièrement rappelé par Roparz Hemon et par Yann Fouéré (lesquels étaient, il faut tout de même le rappeler, des agents de la Gestapo) et c’est Roparz Hemon lui-même qui a écrit que l’orthographe avait été surunifiée « sur ordre des Allemands ». Mais il ne faut pas le mentionner. Pourtant, la fraise s’appelle la freizh par analogie avec Breizh, forme résultant de la surunification du breton sur ordre des nazis… Explication interdite. Pourquoi ? La réponse, elle aussi, est claire et nette : le mouvement breton dans sa quasi-totalité a collaboré sous l’Occupation : ce qui fait la spécificité de la Bretagne, c’est la présence d’un groupe organisé formant une toile d’araignée sur la région. Le mouvement breton a collaboré et s’est attiré, ce faisant, la haine des Bretons. S’il s’efforce coûte que coûte d’occulter le passé, c’est qu’il entend désormais parler au nom des Bretons, et qu’il le fait. C’est bien cette usurpation que je dénonce.
Les commentaires ne sont intéressants dans leur ensemble que par leur grossièreté machiste — vieille caractéristique héritée du passé du mouvement breton. Cependant, l’un d’entre eux me semble digne d’être lu. Contrairement à l’usage des militants bretons, son auteur se nomme : dans la vie réelle, il vend des pizzas, produit peu breton qu’il s’est néanmoins efforcé de rendre identitaire en le plaçant sous le label Pizz ar Breizh Mad. Ce nom montre qu’il n’est pas même capable d’écrire correctement le breton surunifié, langue de sa nation, mais ça ne fait rien, il récite le parfait catéchisme du militant de base. Et la manière dont il retourne l’histoire mérite d’être prise en compte car cette inversion se change en lieu commun que je vois désormais partout réitéré (y compris par des élus, et l’endoctriné de base fait-il autre chose que répéter le credo ?).
Voici ses observations :
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« Groupe de bretons nationalistes ralliés aux nazis, combien ? moins de 80 … contrairement aux français qui donnèrent la france, les juifs aux nazis.
Qui plus est, la Bretagne n’est qu’une colonie française et la france n’a aucun droit sur elle.
Dons, la Bretagne est toujours sous occupation française, c’est du droit, il n’y a aucun traité d’union et s’il existe …. ce qui me fait doucement rire par avance, que vaudrait la validité de ce traité ? rien, que dalle, il n’a jamais été respecté, dons la france dehors et Breizh debout et non pas marcher droit devant nos bons maîtres imposés et encore moins devant les collabos bretons dont vous faites partie. »
.Il ne faut pas considérer qu’il s’agit là du délire d’un zombie frappé du « coup de Breizh », cette illumination qui change un citoyen lambda en militant breton prêt à tout pour sauver sa mère patrie opprimée par la marâtre France : cette réécriture de l’histoire est en voie de se banaliser.
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Je pensais m’en tenir à ce commentaire mais, finalement, les autres sont aussi captivants pour qui s’intéresse au syndrome de la freizh. Un lecteur, qui se désigne, lui aussi, par son nom (pratique étrangère au militant breton), un certain Jean-Charles Le Corre, éprouve le besoin de se pencher sur mon cas, et de m’inviter à me soigner car un Breton qui n’aime pas la freizh n’est pas un Breton normal, et, si c’est une Bretonne, elle a besoin d’une psychanalyse en règle pour se guérir de son absence de goût pour la freizh (ce qui se dit en langage brittophile « sortir de son merdier »). Après quoi, elle aimera la freizh et pourra « finir l’âme en paix ». Ce pieux vocabulaire est l’illustration exacte de ce que je n’ai fait que constater depuis que je me penche sur le problème : le mouvement breton est né dans les sacristies, de l’esprit de revanche contre la Révolution française, la Bretagne s’associant à la religion dans une espèce de bigoterie prête à resurgir à tout moment. La freizh aura été utile pour en donner un exemple.
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« Ah Mme Morvan!…Mme Morvan!… Z’êtes vraiment trop forte! Quelle digression! Partir d’une affiche vantant les mérites de la fraise de Plougastel pour en arriver aux collabos de l’an 40, moi je dis chapeau!… Grand à dû être le traumatisme Mme Morvan, hein? Devez pas rigoler tous les jours… Une petite analyse…pensez pas que ça vous ferait du bien? Essayer de vous sortir de ce merdier? Tâcher de finir l’âme en paix ? »
…;.Un commentaire anonyme mérite qu’on s’y arrête aussi : on me demande si, moi qui suis si hostile à l’« identité bretonne », je serais d’une égale férocité avec les autres « identités », dont l’« identité française ».
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« L’esprit critique et le recul que vous avez vis à vis de l’identité bretonne s’applique t-il aux autres identités? par exemple, vis à vis de l’identité française? »
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Pour ces personnes soumises depuis des années à la propagande identitaire véhiculée par les médias bretons, l’identité bretonne, c’est donc la freizh mondialisée : adhésion totale à la propagande de l’Institut de Locarn, triomphe du « monde comme si »…
Qu’est-ce que l’identité bretonne ? La freizh !
Et l’identité française ? La freizh !
Car c’est dans le XIIIe arrondissement, sur un quai de métro, que mon identité s’est brusquement manifestée par un cliché antifreizhien que j’ai ensuite accompagné des quelques lignes qui devaient être partagées par tant de lecteurs.
Qu’ils en soient remerciés.
L’identité, pour moi, c’est comme la race : un concept creux. La freizh.
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Comme le débat continue, voir « La freizh (suite et peut-être pas fin) ».
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