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Ça y est, ils sont parus, les cinq livres de la sixième saison des éditions Mesures ! Nous les aurons demain.
Je vais juste reprendre ici le texte qu’André a publié pour annoncer le lancement de cette nouvelle saison.
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Six ans de travail quotidien, de passion et d’inquiétudes, de surprises et de joie, six ans et trente-deux livres, et cette sensation étrange de liberté et de jeunesse alors que nous sommes loin d’être jeunes, mais si, en fait, vraiment, malgré les fatigues qui s’accumulent, juste parce que nous faisons ce que nous ne pouvons pas ne pas faire, et qu’à chaque fois, pour chaque livre, c’est, oui, une maison qui se construit, et comme un chœur qui se développe, – les livres se répondent, même si, bien sûr, les lecteurs, le plus souvent, ne peuvent pas le voir (quoique…), ils touchent des cœurs, à une toute petite échelle, – la nôtre – et ils nous valent, souvent, des réactions bouleversantes. Bref, chers amis, voilà. Aujourd’hui, nous lançons donc l’abonnement pour la sixième année.
Vous verrez sur notre site, évidemment, mais quels sont ces livres ?
D’abord, Un an de guerre. – J’ai rassemblé mes chroniques facebook de l’année 2022. Celles, donc, de la première année de guerre. La guerre continue et continue encore ; plein de gens me demandaient quand elles seraient publiées, ces chroniques. Fallait-il attendre encore ou publier en même temps celles de 2023 et 24 ? Le livre aurait été impubliable, juste par le poids et la grosseur. Non. Un an de guerre est donc un témoignage, et, je puis le dire, un acte de combat. Et c’est pour ça que nous commencerons par lui.
Ensuite, à l’opposé, on pourrait croire (mais, si on y réfléchit, pas du tout), c’est la traduction de Roméo et Juliette faite par Françoise, – une traduction qui devrait être jouée (je touche du bois) l’année prochaine (2026) par notre ami de trente ans, Patrick Pineau, à la La Scala. Une traduction qui, étrangement ou non, est la première en France, pour une pièce que l’on connaît dans le monde entier, à prendre en compte la forme : le fait qu’elle s’ouvre sur un sonnet et qu’au moment où Roméo et Juliette se découvrent, ils créent un sonnet. – Françoise s’est prise de passion pour la pièce, elle l’a traduite en moins d’un mois. Et c’était quelque chose de voir ça. – Vous verrez.
D’autant plus si vous avez lu nos Sonnets de Shakespeare, publiés voilà déjà deux ans. Et si vous lisez un autre livre, qui paraît cette année, un livre de Françoise : Clair Soleil des esprits , qui est une grande première pour nous. Un choix de poèmes – majoritairement des sonnets, mais pas que – des contemporains de Shakespeare en France, de cet âge d’or de la poésie que fut l’époque dite baroque, de ces poèmes qui irriguent les livres écrits par Françoise elle-même, ceux de Sur champ de sable ou Pluie et L’Oiseau-loup. C’est, en redécouvrant des auteurs comme Philippe Desportes, Étienne Durand ou le cardinal Du Perron, une autre façon de traverser le temps, – par cercles concentriques, par échos rayonnants.
Le quatrième livre est La Quatrième Prose d’Ossip Mandelstam. Un texte que j’avais traduit, voilà près de trente ans, pour les éditions Christian Bourgois, qui est resté pendant des années et des années introuvables, et que j’ai entièrement refait, repensé. C’est, après une accusation ignominieuse de plagiat pour la traduction de Till Ulenspiegel(due à une bourde de l’éditeur), le moment de bascule pour Mandelstam. Sa quête de justice, et cette rage qui le possède au moment où il comprend la lâcheté des autres, et, du coup, avec la certitude de l’issue – qui ne pouvait qu’être la mort –, celui où, jugeant et le régime et ses collègues, il peut se remettre à écrire de la poésie. Surtout, c’est à partir de l’indignation et de la langue de ce texte que Boulgakov va créer le personnage du Maître dans Le Maître et Marguerite(le personnage n’apparaît dans ses brouillons qu’à partir de 1934, après l’arrestation de Mandelstam pour le poème contre Staline dont vous lirez la traduction en conclusion du volume).
Et puis, justement, nous publions un texte de Boulgakov. Une de ses plus grandes pièces, généralement connue comme La Fuite, mais, en russe, le titre, Beg, signifie plutôt La Course (c’est notre titre français), et il s’agit bien, par-delà l’évocation de « huit rêves » autour du désastre et de la fuite de l’armée blanche en Crimée et de l’émigration, de l’évocation d’une course sans fin, dans la prison du temps, d’une course pathétique et souvent grotesque, tragique, et infinie. – Cette pièce, pour nous, fait écho à De vie à vie de Tsvétaïéva et Volochine, et surtout aux poèmes sur la terreur en Crimée écrits par Volochine.
Mais regardez, de fait : Mesures propose aujourd’hui des œuvres de Léonid Andréïev, d’Alexandre Blok, Evguéni Tchirikov (Les Juifs), de Marina Tsvétaïéva, Maximilian Volochine, Anna Akhmatova (Les Élégies du nord), Mikhaïl Boulgakov, Iliazd, Daniil Harms… Des auteurs qui, tous, ont mis la liberté, et donc la dignité, au cœur de leur vie, et qui, tous, oui, tous sans exception, en ont payé le prix face au régime mortifère qui ravageait leur pays. Oui, c’est un chœur, et c’est un chœur qui répond aux livres de Françoise, à ses traductions du français en français, La Folie Tristan » et La Grièche d’hiver de Rutebeuf, de ses livres « non-traduits », et tout se retrouve dans les Sonnets de Shakespeare (et tous les sonnets de Mesures, ceux d’Iliazd, les miens propres (Orbe) et ceux, aujourd’hui, de Clair Soleil des esprits, qui reprend quelques sonnets de Shakespeare, en proposant une reprise de la traduction de Marot de quelques sonnets de Pétrarque, puis quelques traduction, par Françoise, de sonnets de Garcilaso de la Vega et de Camoëns).
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Pour chaque livre, comme pour les autres années, c’est Françoise qui propose la charte graphique, avec une série d’illustrations pensées en fonction du texte.
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Le prix de l’abonnement reste le même, 100 €, malgré l’augmentation drastique de tous les prix – celle du papier (délirante), celle des tarifs postaux. Avec cette tragédie encore à venir et dont je n’entends pas tellement parler, la disparition programmée du tarif « livres et brochures », qui interdira à je ne sais combien d’éditeurs d’envoyer des livres à l’étranger… Mais bon, nous essayons de maintenir ce prix de 100 €. Nous verrons bien si, à la fin de l’année, nous sommes en déficit, et de combien. Pour l’instant (je re-touche de bois de mon bureau) nous avons payé des impôts. Moi, évidemment, je travaille gratuitement, mais nous payons, tout aussi évidemment, les droits d’auteur, et nous sommes encore là.
Mais nous avons besoin de vous. Abonnez-vous, faites, comme les cinq années précédentes, faites vivre cette expérience d’AMAP éditoriale, – cette zone, comme dit Françoise, de liberté intérieure. Abonnez-vous. – L’idée est que vous receviez un livre tous les deux mois, numéroté, signé et dédicacé (à qui vous voulez, vous nous direz).
Et puis, cette année, il y a quelque chose d’autre. Cette année, notre Saison VI, nous la lançons vraiment. Nous avons reçu la proposition de Jérôme Triaud, qui dirige les bibliothèques d’Avignon, de faire une exposition sur nos éditions Mesures à la Bibliothèque Ceccano, – qui existe depuis le Moyen Age, et qui est une des bibliothèques patrimoniales les plus riches de France. C’est un honneur inouï. Nous occuperons toute la galerie du premier étage avec huit vitrines (sans compter les cimaises).. Nous sommes encore en train, au moment où j’écris, d’imaginer le récit, de vitrine en vitrine, de faire, comme l’a dit Françoise, « une synthèse » de nos vies. L’inauguration officielle se fera le 24 janvier, à 18 h, avec une visite de l’exposition et une rencontre-lecture. J’en reparlerai encore, évidemment.
Bref, voilà. C’est lancé. Les livres vous attendent. Vous commencerez à les recevoir à partir de début février, en commençant, donc, par Un an de guerre.
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